
Comment évaluer son rapport à la Biodiversité ? Découvrir les outils. – Par Soltena et Vertigo Lab (2020)

En 2020, Soltena et Vertigo Lab s’associaient pour rédiger un article autour du panel d’outils à disposition des entreprises pour travailler sur la biodiversité. L’actualité « Entreprise et biodiversité » de Soltena étant particulièrement chargée cet automne (sortie du cahier technique, diffusion des capsules vidéo de l’opération pilote, journée de bilan de celle-ci, etc. ) nous avons décidé de vous partager le travail réalisé à l’époque.
La crise de la biodiversité : un enjeu mondial
Au même titre que le climat, la biodiversité mondiale traverse une crise sans précédent. Selon le rapport de l’IPBES sorti en 2019, 1 million d’espèces seraient menacées d’extinction dans les années à venir et le constat est déjà alarmant avec une diminution de 68% des populations de vertébrés – poissons, oiseaux, mammifères et reptiles – entre 1970 et 2016 (WWF, 2020). D’un autre côté 55 % du PIB dépend de la biodiversité et d’écosystèmes performants (SWISSRE, 2020).
Les grandes causes d’érosion de la biodiversité
Cinq grandes pressions directes sont responsables de cette érosion de la biodiversité :
- Les changements d’usage des sols et des terres : artificialisation, agriculture
- L’exploitation des espèces et de leurs habitats
- Le changement climatique
- Les pollutions
- Les espèces exotiques envahissantes
Le rôle des entreprises sur la biodiversité
Que ce soit par obligation réglementaire, sous la pression des parties prenantes, dans le cadre de leur démarche RSE ou par engagement volontaire, les entreprises cherchent à mieux comprendre et à mieux évaluer leur impact sur la biodiversité qu’il soit direct ou indirect. Les notions de limite planétaire et même de seuil écologique sont de plus en plus présentes dans l’actualité et les entreprises et les financeurs sont en demande d’indicateurs environnementaux leur permettant d’évaluer l’impact biodiversité de leur activité ou des projets qu’ils financent.
De quoi parle-t-on lorsque l’on parle d’empreinte biodiversité ? de Capital naturel ? Impact direct ou indirect, impact local ou importé ? A l’échelle du produit, du projet, du site, de l’ensemble de l’activité, de la filière, du pays ? Sur les espèces, leur habitat, les services écosystémiques ? Autant d’angles d’attaque qui complexifient un sujet lié au vivant dont l’aspect dynamique et évolutif constant ne simplifie pas les choses !
Pour les entreprises qui souhaitent être sensibilisées au sujet et mieux l’appréhender, les ateliers de la fresque de la biodiversité constituent une très belle solution permettant de mieux comprendre les enjeux et pressions sur la nature, au travers d’un atelier ludique collaboratif, visuel et accessible à tous.
Des outils sur mesure
Quel que soit le besoin et le niveau de maturité, l’entreprise devra ensuite réaliser un travail d’identification de l’ensemble de ses activités directes et indirectes, et des flux associés pour espérer questionner correctement son impact écologique. Comme pour l’évaluation carbone, les entreprises sont à la recherche d’outils pour évaluer leur rapport à la biodiversité et identifier leurs pistes d’actions. Malheureusement, il n’en existe pas d’unique sur le sujet et de multiples moyens ou combinaisons d’outils sont à l’étude dans le monde.
Entre les outils de mesure de l’empreinte biodiversité, ceux d’aide à la décision (cartographiques, qualitatifs, quantitatifs, monétaires), de comptabilité ou de performance, il peut être complexe de s’y retrouver et d’identifier celui qui convient à ses attentes, ses activités et son niveau de maturité. Des groupes de travail nationaux et internationaux accompagnent la démarche des entreprises pionnières dans l’utilisation des outils et leur évolution : Chaire de comptabilité écologique et son Lab Capital Naturel porté conjointement avec le WWF, la Plateforme de l’initiative française pour les entreprises et la biodiversité, le groupe de travail d’Orée Biodiversité et économie ou le Club B4B+ de la CDC Biodiversité permettent de faire avancer conjointement chercheurs, développeurs, entreprises et experts de la comptabilité extra-financière autour d’une même ambition : développer les outils qui fourniront aux professionnels les indicateurs accompagnant la prise de décision dans leur rapport à l’impact biodiversité.
Le guide du WWF Capital naturel et Stratégie des organisations sorti en 2019 offre un tour d’horizon des nombreux outils existants, de leur utilisation et de leurs spécificités. La Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité (FRB) a également proposé en mai 2021 le rapport Indicateurs et outils de mesure – Évaluer l’impact des activités humaines sur la biodiversité ? qui dresse l’évaluation de 7 indicateurs et outils utilisés, de leurs atouts, de leurs faiblesses et des préconisations d’évolutions.
Parmi les outils les plus couramment évoqués dans la littérature :
- Global Biodiversity Score™ (GBS), développé par la CDC Biodiversité pour Évaluer l’empreinte biodiversité des entreprises et des investissements. L’outil s’adresse à tous les secteurs d’activités sauf ceux impactant la biodiversité marine, les espèces exotiques envahissantes et la pêche et la chasse commerciale.
- Product Biodiversity Footprint (PBF), développé par I Care & Consult et Sayari qui s’adresse à tous types d’entreprises qui souhaitent mettre en évidence les efforts faits pour réduire les impacts sur la biodiversité à travers leur « empreinte produit ». Biodiversity Indicator and Reporting System (BIRS) développé par l’UICN pour évaluer les changements de biodiversité sur les sites d’exploitation d’une entreprise et les risques de futurs projets pour la biodiversité.
- Species Threat Abatement and Recovery (STAR) Metric développé par l’UICN pour évaluer l’impact sur la biodiversité des investissements financiers en faveur de sa protection ?
- Comprehensive Accounting in Respect of Ecology Triple Depreciation Line (CARE-TDL) développé par la Chaire de comptabilité écologique, outil de comptabilité qui considère les capitaux financiers, naturels et humains.
- Science Based Target for Nature (SBTN) développée par la Global Commons Alliance un consortium regroupant entre autres The Earth Commission, l’UICN ou le WWF, est une méthodologie en 5 étapes permettant de définir « des objectifs environnementaux scientifiques pour enrayer la dégradation et la perte de biodiversité » (WWF, 2019).
- L’Indicateur d’Interdépendance de l’Entreprise à la Biodiversité (IIEB) et sa grille d’autoévaluation en libre accès développés par OREE et l’Université de Paris Diderot
- BioScope développé par Pré Sustainability, Arcadis et CODE, outil d’évaluation des impacts biodiversité de la chaîne de valeur.
D’autres outils sont spécialisés en fonction de typologies d’activités ou d’impacts. C’est le cas du Biodiversity Indicator for Extractive Companies (BIEC), développé par UNEP-WCMC, Conservation International et Fauna & Flora International à destination des entreprises extractives pour surveiller le risque et la gestion des mesures de réponse associées à l’impact sur la biodiversité ou du Biodiversity Footprint for Financial Institutions (BFFI), développé par ASN Bank, CREM et Pré Sustainability qui s’adresse aux établissements financiers pour calculer l’impact des investissements sur la biodiversité. C’est aussi le cas du Biodiversity Impact Metric (BIM), développé par Cambridge Institute for Sustainability Leadership (CISL) pour aider à la décision des entreprises, par une évaluation des impacts des produits sur la biodiversité selon des endroits géographiques. L’outil s’adresse aux entreprises impliquées dans des chaînes d’approvisionnement mondiales (Agroalimentaire, mode, cosmétique, pharmaceutique, foresterie, etc.).
Si ces démarches semblent encore trop prospectives, et/ou que l’approche du sujet au sein de l’entreprise est à son stade initial, la démarche d’évaluation RSE peut permettre de se poser les premières questions sur ses impacts directs et indirects et ceux de ses parties prenantes. La mise en place d’une démarche d’achats responsables intégrant des critères de préservation de la biodiversité pourra constituer un premier levier auprès des fournisseurs. La plateforme RSE a publié en 2020 son rapport Empreinte biodiversité des entreprises pour apporter sa vision.
L’analyse de cycle de vie des produits permet également d’avoir une vision parcellaire de l’impact biodiversité (eutrophisation, utilisation des sols, etc.) et d’identifier des alternatives de matière première ou de production moins impactantes.
Enfin, la Norme Biodiversité AFNOR NF X32-001 est un outil d’aide à la décision qui s’adresse à tous types d’organisations pour questionner, mettre en place et évaluer un projet de préservation de la biodiversité. La norme va permettre d’accompagner la construction de l’action, dans la définition des actions, des indicateurs pour mettre en lumière les actions engagées par les entreprises et les territoires en faveur de la biodiversité.
Pour conclure, quel que soit le niveau de la démarche, la méthodologie choisie ou les outils expérimentés, la prise de conscience que sa structure a un rôle à jouer pour la préservation de la biodiversité est une première étape fondamentale.
Alors à vous de jouer !
Et pour vous aider à vous lancer sur le sujet, voici un arbre d’aide à la décision pour vous guider :
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